IL, ET SA NUIT


Poésie de Régis Lefort
Musique de Pierre-Adrien Charpy

Raphaële Kennedy | voix
Valérie Dulac | violoncelle
Pierre-Adrien Charpy | électronique en temps réel
Philippe Boinon | son

Le spectacle poétique et musical Il, et sa nuit est le fruit d’une écriture croisée, d’allers-retours créatifs entre le poète Régis Lefort et le compositeur Pierre-Adrien Charpy. À l’arrivée on ne sait plus quel art a engendré l’autre, comme l’eau et le sable sur la plage en cette zone de balancement des marées, ce lieu appelé « estran » qui tour à tour est recouvert par la mer ou découvre la terre au ciel. Tout au long du spectacle, en vingt-deux fragments, la musique est la nuit du poème, son inconscient, une écriture sonore d’où, à chaque fois, émerge une aube textuelle. La voix de Raphaële Kennedy s’unit au violoncelle de Valérie Dulac pour donner corps à cette création dans l’environnement aux multiples textures de l’électronique musicale.

La nuit vient dans les yeux
La nuit de quelqu’un d’autre,
Sa parole qui accompagne.
James Sacré

[…] La première réussite est le choix de ne pas mettre en musique intégralement les poèmes en prose – tirés d’Il, et sa nuit et d’Elle suivait le vent – mais d’en saisir des fragments comme la matière d’un rêve, l’énergie d’un voyage, la liberté d’un inconscient. Les vingt-deux numéros alternent comme autant de préludes avec la lecture enregistrée par l’écrivain, et la musique et la poésie y gagnent en pouvoir d’évocation : l’univers sonore est somptueux, les mots raréfiés atteignent parfois la fulgurance. […] une écriture où les lignes demeurent toujours lisibles, un travail patient sur les textures : celles de la voix, médium opalescent, sauts d’octave vers le cristal avec ce qu’il faut de quarts de ton pour mieux entendre l’étrangeté ; celles du violoncelle, sans doute le lieu le plus expressément virtuose de la composition, qui multiplie les modes de jeu et les saturations comme dans un espace de matière troué par la lumière de la soprano. Raphaële Kennedy, évidemment familière de la musique de son époux, est une soliste qui voyage avec la même aisance du madrigal renaissance à la création d’aujourd’hui. Elle partage au sein de l’ensemble Da Pacem une complicité de goût et de savoir-faire avec Valérie Dulac, ici violoncelliste mais qui est tout autant joueuse de vièle ou de rebec. […] Il, et sa nuit, que ce soit au bord du silence ou dans ses moments de grande intensité, est une musique qui nous fait une place : elle nous accueille, nous reçoit, elle nous ouvre. […]
ConcertClassic, Didier Lamare, novembre 2021


EKSTASIS


En coproduction avec Jean-Baptiste Barrière / Image Auditive 
Musique de Kaija Saariaho, Jean-Baptiste Barrière
Créations visuelles de Jean-Baptiste Barrière

Aliisa Neige Barrière | violon
Camilla Hoitenga | flûtes
Raphaële Kennedy | voix
Jean-Baptiste Barrière | conception et réalisation des images, réalisation de l’informatique musicale
Pierre-Jean Bouyer, François Galard | traitements vidéos
Isabelle Barrière | caméras et contrôle vidéo
Thomas Goepfer | réalisation de l’informatique musicale

Correspondances sensorielles, déplacement de l’imaginaire, renversement des perspectives : c’est à une expérience similaire que vous invite Ekstasis, construit par le son et l’image autour de six œuvres de Kaija Saariaho et de Jean-Baptiste Barrière. La complémentarité de leurs parcours de créateurs, vivant ensemble et travaillant souvent de même, dessinent l’organisation assez précise du travail présenté. Prima la musica, dopo la visione… Les trois œuvres de Kaija Saariaho sont des compositions musicales, des constructions sonores, acoustiques et électroniques, préexistant à la vision qu’en déploie son époux. Les trois pièces de Jean-Baptiste Barrière ont été pensées comme des œuvres multimédias, et d’abord pour le concert visuel, avec des lignes et des rythmes peut-être plus directs, qui laissent ouverts des espaces propres à recevoir les images.
Didier Lamare

Ce concert/spectacle, avec sa dimension visuelle qui s’inscrit étroitement dans la continuité de mon écriture, propose […] un chemin, une traversée de mon œuvre, et témoigne de manière originale de mon parcours musical.
Kaija Saariaho

Avant tout, l’image ne doit pas empêcher d’écouter la musique […]. Elle ne saurait non plus être plaquée sur la musique, ou au contraire illustrative de la musique. Pas plus ne doit-elle procéder du commentaire sur ou autour de la musique. Elle doit donc se réaliser à travers son écriture propre, articulée formellement avec l’écriture musicale, procédant des mêmes idées ou techniques de composition, mais développées dans une autre dimension sensible, sans pléonasme ni antagonisme arbitraires, en interaction dynamique et évolutive. […] Dans ce programme, la musique se déploie dans l’image, l’une devient le prolongement de l’autre.
Jean-Baptiste Barrière

Un voyage sensoriel qui accompagne une musique qui l’est tout autant.
Le soir, Gaëlle Moury, 2019

[…] Même propension à la confidence intimiste dans les trois œuvres de chaque compositeur. Celles de Saariaho (écrites dans les années 1990) témoignent d’une exceptionnelle qualité de déploiement. Tissage arachnéen pour Nocturne, amplification spatialisée pour NoaNoa et révolutions enchanteresses pour Lonh. Plus récentes (2003-2014), celles de Barrière (le virevoltant Crossing the Blind Forest, l’envoûtant Violance et le pénétrant Ekstasis) révèlent un goût pour la projection du geste vocal ou instrumental qui, […] assure que le musicien se double d’un authentique metteur en scène.
Le Monde, Pierre Gervasoni, juin 2019

Trois musiciennes complices sont ici réunies : la flûtiste Camilla Hoitenga, fidèle aux dédales des deux compositeurs ; la violoniste Aliisa Neige Barrière, leur fille, dont la présence physique et musicale diffuse un enchantement vénéneux ; la soprano Raphaële Kennedy, dans une incarnation à la pointe d’argent qui impose à notre avis les versions de référence des deux pièces vocales.
L.L., août 2019

It was fascinating to hear what a well-balanced whole the two composers’ respective works produced. […] the two composers share many features in common, in particular their ability to structure multiple narrative layers at once and their simultaneous perception of past, present and future. At the heart of this is their unflinching belief in the relevance of modern art and its expressive powers. […] The soprano Raphaële Kennedy had perfectly internalised the worlds of Saariaho’s Lonh and Barrière’s Ekstasis.
Aamulehti, Harri Hautala, 2021

Ekstasis was also an opportunity to showcase some of Saariaho and Barrière’s most trusted musicians, people who know exactly what performing these works requires. […] Camilla Hoitenga, Aliisa Neige Barrière and Raphaële Kennedy all performed their respective roles with great conviction […].
Helsingin Sanomat, Samuli Tiikkaja, 2021

Ekstasis is a fascinating fusion of concert and multimedia performance […]. Raphaële Kennedy’s free, flexible and highly expressive voice was given the final word in the concert in Barrière’s Ekstasis for soprano and electronics.
Hufvudstadsbladet, Heidi Korhonen-Björkman, 2021

Soprano Raphaële Kennedy gave an outstanding rendition of the vocal element of the piece, which includes much pure singing but also a wealth of extended vocal techniques. Accompanied only by electronics, Kennedy managed to retain her sense of pitch while sailing magnificently through the enormous vocal challenges Lonh presents.
Opera News, Argo McKinnon, 2012

[…] Lonh, a solo soprano work given a virtuosic reading by Raphaële Kennedy […]
The New-York Times, Allan Kozinn, 2012

Raphaële Kennedy was the riveting soloist in the newest work on the program, Ekstasis.
The New-York Times, Zachary Woolfe, 2014


LE DOUX PARFUM DES TEMPS À VENIR


Texte de Lyonel Trouillot
Musique de Pierre-Adrien Charpy

Raphaële Kennedy | voix
Camilla Hoitenga | flûte
Serge Bertocchi | saxophone
Valérie Dulac | violoncelle
Jean-Jacques Bédikian | piano

Le doux parfum des temps à venir explore les méandres de la mémoire et de l’imagination à partir des confidences d’une mère – au soir de sa vie – à sa fille. Ce récit au féminin écrit par un homme interroge les multiples visages de la vérité, aussi insaisissable et riche qu’un parfum. C’est cette transmission d’une quête inlassable de soi parmi les étranges bifurcations d’une vie que le spectacle met en scène par la rencontre des sons et des mots, comme autant de reflets d’une réalité fugitive.

Composé à partir du magnifique poème de l’auteur haïtien Lyonel Trouillot, Le doux parfum des temps à venir est une sorte d’opéra non mis en scène, ou de cantate nocturne écrite pour une voix chantée de soprano et sa propre voix parlée en miroir […]. Deux principaux gestes musicaux structurent la composition : différentes techniques instrumentales spécifiques (multiphoniques, saturations, instruments préparés…) évoquent le parfum par les textures sonores, et divers motifs polyrythmiques évoquent la musique traditionnelle caribéenne. La troisième caractéristique de la pièce est l’attention particulière accordée à l’écriture de la partie vocale. Plusieurs thèmes parcourent le texte : relation mère/fille, mort, transmission, vérité, violence… mais ce sont les violences faites aux femmes et la capacité de résilience qui ressortent le plus intensément.
Pierre-Adrien Charpy

Votre musique est âpre, violente et sensuelle. Il n’est pas aisé ni confortable de mettre en musique la violence, le mensonge et la honte. Longtemps les « Je t’ai menti » dits si superbement par Raphaële résonneront. […] Cette œuvre est essentielle car elle évoque cet acte fondateur qui fait que les enfants naissent et viennent au monde. Votre musique dit bien tout cela et dans cette tension et le danger présents que vous avez si bien su créer, qu’il est doux d’avoir ces apaisements et cet espoir des moments à venir. […] Merci aux artistes écrivains, musiciens qui font entendre les voix des petits, des souffrants, des malmenés par la vie, et leur donnent une juste place sans misérabilisme ni charité, rendant justice à leur beauté.
Cécile Santarelli, 2019

Il y a quelque chose dans la voix de Raphaële Kennedy qui emporte et met à terre en même temps. Quelque chose de caverneux ou d’ancestral. Quelque chose qui porte le son vers sa plus haute demeure. Je veux dire que la sensation éprouvée par le corps […] est celle d’un emportement ou d’un enlèvement.
Régis Lefort, poète, 2019


L’ÎLE PARADIS QU’ON NE DOIT PAS DIRE


Textes de Henry Bauchau
Musique de Pierre-Adrien Charpy
Vidéo d’Isabelle Françaix

L’écrivain Henry Bauchau (1913-2012) s’écrit à lui-même et destine à ses lecteurs ses réflexions intimes. À partir de ses lettres et de ses journaux rédigés pendant la gestation et l’écriture du roman L’enfant bleu (Actes Sud, 2004) conçu sur une histoire vraie, ce spectacle explore librement les correspondances entre ce qu’on ne sait pas, vit, rêve ou crée quand le quotidien se déchire. Dans l’écho mystérieux des images et des sons, le jeune psychotique Orion dessine à l’hôpital de jour auprès de son « psychothéraprof » les labyrinthes qui le guideront vers la création.

L’enfant bleu est bien un texte fait pour être lu et peut-être un jour mis en musique.
Henry Bauchau, Passage de la Bonne-Graine, 1999

Merci de m’avoir – nous avoir – fait vivre cet instant unique. Je suis sûr qu’Henry [Bauchau] était avec vous, avec nous, et qu’il aurait assurément beaucoup aimé votre Enfant bleu. […] On ne ressort pas indemne de L’île Paradis qu’on ne doit pas dire. […] À tous, nous étions avec vous, avec l’autre, avec le vivant, avec ce qui en nous, nous dépasse et nous comprend. Nous étions dans « l’hymne corporel », celui qui nous anime et nous porte vers l’espérance. […] Nous étions soulevés. Nous sommes descendus dans l’amour et nous avons éprouvé le plus enseveli « dans l’île et le trésor ». Nous étions face à l’abrupt d’une évidence sans nom.
Régis Lefort, écrivain et poète, spécialiste d’Henry Bauchau, 2018

[Un] spectacle de très haut niveau, très très fort, et très respectueux et juste par rapport à l’oeuvre d’Henry Bauchau.
Thierry-Pierre Clément, poète, 2019

Le spectacle […] met en forme, au prix d’un travail méticuleux, un labyrinthe de sons et d’images, de couleurs et de mots, de voix et de chant… où chacun peut se perdre au gré de son imaginaire. La musique […] de Pierre-Adrien Charpy développe un monde sonore riche […]. Elle est omniprésente, mais laisse une place nécessaire au discours, au récit en mosaïque des voix parlées et/ou chantées de Raphaële Kennedy et Vincent Bouchot. Leur duo émeut au-delà du propos, par leur présence puissante et complice, amplifiée par la « mise en son » fantasmagorique de l’ingénieux-ingénieur Franck Rossi. Le spectacle d’« art total » vaut aussi par la poésie de la création vidéo d’Isabelle Françaix et ses images mouvantes […].
Zibeline, Jacques Freschel, 2018


Crédits photos:
Il, et sa nuit©Alain Boeuf
Ekstasis©Jean-Baptiste Barrière
Le doux parfum des temps à venir©Isabelle Françaix
Les narvals©Lionel D.
L’île Paradis qu’on ne doit pas dire©Isabelle Françaix